samedi 30 juillet 2016

Les jours de mon abandon - Elena Ferrante

Par Ariane


Auteur : Elena Ferrante

Titre : Les jours de mon abandon

Genre : roman

Langue d’origine : italien

Traducteur : Italo Passamonti

Editeur : Gallimard

Nombre de pages : 232p

Date de parution : avril 2014

Présentation de l’éditeur :

Olga, trente-huit ans, un mari, deux enfants. Un bel appartement à Turin, une vie faite de certitudes conjugales et de petits rituels domestiques. Quinze ans de mariage. Puis, un après-midi d'avril, une phrase de son mari met en pièces cette existence sereine et transforme Olga en femme abandonnée. Une femme rompue. Lâchée, brisée. Una poverella, comme cette voisine de son enfance napolitaine dont elle croit encore entendre les pleurs la nuit. Frappée de stupeur, Olga ne comprend rien au prétendu «vide de sens» de l'homme qu'elle a suivi à Turin, et pour qui elle a abandonné l'écriture. L'homme avec qui elle voulait vieillir est devenu l'homme qui ne veut plus d'elle. Olga n'existe plus. Ou seulement dans sa lente déchéance, dans cette descente aux enfers où la terre semble se dérober sous ses pieds, et les événements se liguer contre elle : un repas de réconciliation se termine dans le sang, son garçon tombe malade, le téléphone est coupé sans raison, le berger allemand agonise, sans doute empoisonné, puis la porte de l'appartement se bloque de l'intérieur et Olga se retrouve enfermée... Le livre d'Elena Ferrante nous projette littéralement dans l'intimité d'Olga et nous embarque pour un voyage aux frontières de la folie. Par la justesse de son ton et son rythme haletant, Les jours de mon abandon constitue une variation parfaitement maîtrisée et originale sur le thème de la femme abandonnée.



Mon avis :

C’est désormais chose certaine, Elena Ferrante devenue un auteur incontournable pour moi. Après avoir eu d’énormes coups de cœur pour les deux premiers tomes de L’amie prodigieuse, au point d’avoir envie de les faire lire à tout le monde (d’ailleurs j’attends avec impatience l’avis de Roxane, Daphné a elle aussi eu un coup de cœur), j’avais beaucoup aimé Poupée volée. Je poursuis ma découverte de son œuvre et une nouvelle fois je suis totalement sous le charme.

Olga mène la vie ordinaire d’une femme au foyer. Mère de deux jeunes enfants, elle est mariée depuis près d’une vingtaine d’années à un homme pour lequel elle a renoncé à sa carrière. Son monde s’écroule lorsque celui-ci lui annonce soudainement qu’il la quitte.

Le récit d’une femme quittée et trompée qui pourrait être très banal, mais rien n’est banal avec Elena Ferrante. Elle balaie d’un revers de main les faux semblants et offre le portrait sans fards de cette femme que la douleur et la colère mènent au bord de la folie. Aucune concession dans son écriture, c’est âpre et violent, parfois même agressif et obscène. Olga s’effondre à la suite de l’effondrement de sa vie. La femme au foyer modèle ne s’occupe plus de sa maison, la mère attentive délaisse ses enfants, la femme élégante se laisse aller, la femme cultivée n’utilise plus qu’un langage ordurier et venimeux. Ne reste plus qu’une caricature d’Olga, un fantôme de ce qu’elle était, dépouillée de son identité et de sa vie.

C’est un huis-clos oppressant rassemblant Olga dont la raison se fissure progressivement, ses enfants observateurs inquiets et le chien. Le voisin apparaît à la limite de cet univers, les amis s’éloignent rapidement effrayés par la véhémence de la colère d’Olga, tandis que le mari profite de sa nouvelle vie et de sa nouvelle compagne, insouciant et heureux.

La tension monte lentement, jusqu’à cette journée d’angoisse lorsqu’Olga se retrouve enfermée dans l’appartement avec son fils malade et le chien agonisant. Apogée de la crise d’Olga, cette journée en sera aussi la fin.

Difficile de dire de ce roman qu’il est beau, et pourtant c’est l’impression que j’en garde. C’est un roman qui marque, une variation parfaitement réussie sur un thème déjà souvent abordé par les écrivains.



Extrait :

« Tout était si fortuit. J’étais tombée amoureuse de Mario encore jeune fille, mais j’aurai pu tomber amoureuse de n’importe qui d’autre, d’un corps auquel nous finissons par attribuer je ne sais quelles significations. Un long lambeau de vie passée ensemble et on pense que c’est le seul et unique homme avec qui on aimera vivre sa vie, on lui attribue certaines vertus résolutoires, et c’est, au contraire, seulement un bois émettant des sons de fausseté, on ne sait qui il est véritablement, il ne le sait pas davantage lui-même. Nous sommes des occasions. Nous consumons et nous perdons notre vie parce que, en des temps reculés, tel ou tel a été gentil avec nous, il nous a élues parmi les femmes, tellement il avait envie de décharger son braquemart dans notre corps. Nous prenons son banal désir de foutre pour quelque gentillesse exclusivement adressée à notre personne. Nous aimons son envie de baiser précisément avec nous, avec nous seulement. Oh oui, lui qui est si spécial et qui nous a reconnues spéciales. Nous lui donnons un nom à cette envie du braquemart, nous la personnalisons, nous l’appelons mon amour. Au diable tout cela, quelle foutue bévue, quelle flatterie dépourvue de fondement. »

L'avis d'Eva

 

2 commentaires:

  1. Ce n'est pas mon préféré (je préfère l'Amie Prodigieuse, ou encore Poupée Volée) mais ce huit clos dans la tête d'une femme en pleine crise est extrêmement bien maîtrisé

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    1. Pas mon préféré non plus, mais c'est un très bon roman. Et toujours un plaisir de lire Elena Ferrante.
      Ariane

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