lundi 4 septembre 2017

Les enfants de Venise - Luca di Fulvio

Par Ariane



Auteur : Luca di Fulvio
Titre : Les enfants de Venise
Genre : roman
Langue d’origine : italien
Traducteur : Françoise Brun
Editeur : Slatkine & Cie
Nombre de pages : 798p
Date de parution : mai 2017

Présentation de l’éditeur :
Après l’Amérique des années 20, c’est cette fois-ci la Venise de la Renaissance que l’auteur va choisir comme cadre et comme ancrage de son récit ; un récit à couper le souffle qui reprend certains motifs déjà présents dans le Gang des rêves. Des jeunes gens qui feront tout pour réaliser leurs rêves les plus fous; l’amour qui s’affranchit de tous les obstacles, même les plus insurmontables; la misère et la violence sociale en toile de fond, mais décrite toujours avec justesse et sans voyeurisme; la question, enfin, de l’identité et de l’être au monde. Pour porter l’intrigue aux multiples rebondissements, le narrateur se démultiplie, l’histoire est racontée par plusieurs personnages, dont les destins sont irrémédiablement liés : un jeune voyou, pickpocket à ses heures perdues, une jeune fille juive qui possède un talent singulier et sans limites, son père enfin, avec qui elle entretient une relation difficile mais pleine d’amour…

Mon avis :
Après mes coups de cœur pour les romans d’Elena Ferrante et Golliarda Sapienza, c’est un nouveau coup de cœur pour un auteur italien que je vous présente aujourd’hui. Je crois que je vais m’intéresser d’un peu plus près à la littérature italienne !
Mercurio, Benedetta, Zolfo et Ercole sont des gamins des rues de Rome. Un jour ils détroussent Shimon, un marchand juif. Lorsque celui-ci les retrouve quelques semaines plus tard, une altercation a lieu au cours de laquelle le marchand est grièvement blessé et Ercole meurt. Persuadés que le marchand est mort, Mercurio et les deux autres fuient Rome en direction de Venise. C’est au cours de leur trajet, qu’ils font la connaissance du capitaine Lanzafame d’Isacco et de sa fille Giuditta dont Mercurio tombe amoureux. Ils ignorent que Shimon, devenu muet suite à sa blessure, les suit bien décidé à se venger.
C’est un vrai roman, au sens littéral du terme, avec une histoire romanesque, pleine de péripéties, de nombreux personnages, une histoire d’amour, une histoire de haine, une histoire de vengeance, une histoire de famille, une histoire de rencontre, une histoire de rédemption. Certains lui reprocheront peut-être sa facture trop classique, il est vrai que malgré les nombreuses péripéties, il n’y a pas vraiment de surprise, mais tout fonctionne extrêmement bien. L’histoire, les personnages, la narration tout est parfaitement maîtrisé.
Comment ne pas s’attacher à Mercurio, ce jeune voleur au grand cœur ? A Isacco qui n’hésite pas à s’opposer à tous pour soigner celles que tout le monde rejette ? Au capitaine Lanzafame ce militaire qui se débat avec ses démons mais se range toujours du côté de la justice ? Et à tous les autres, Anna en qui Mercurio trouvera la mère qui lui a toujours manqué, Giuditta la jeune amoureuse, Zuan le vieux marin qui ne peut abandonner son vieux navire… J’ai aimé tous ces personnages, y compris les personnages plus sombres Benedetta, Zolfo, le frère Amedeo, Scarabello, Shimon dont l’auteur nous dévoile les fêlures. Ce sont tous de magnifiques personnages.
Outre l’histoire de tous ces personnages, j’ai aimé le cadre de Venise au début du 16ème siècle. L’auteur nous plonge dans le quotidien de cette ville mythique et mystérieuse, nous en dévoilant les fastes et les misères. J’ai appris beaucoup de choses sur l’organisation de la cité, la vie quotidienne de ces habitants riches et pauvres, le ghetto dans lequel les Juifs sont obligés de vivre.
Toutefois au niveau du réalisme historique un point m’a dérangée : la boutique de Giuditta. Bon, je ne suis pas une spécialiste de l’histoire de Venise, ni de l’histoire du vêtement ou du commerce (non ma spécialité, ce sont les conflits religieux en France aux 17ème et 18ème siècles). Giuditta donc dessine des bonnets puis des vêtements, qui sont vendus ensuite dans une boutique avec vitrine, cabine d’essayage et robes prêtes à porter au 16ème siècle. Alors là je dis non, juste non. Certes cette boutique est une nouveauté et suscite un certain étonnement, mais ce n’est absolument pas crédible. J’ai d’ailleurs repéré une autre incohérence : les enfants siamois de Paolo. Il est impossible que des siamois soient de sexe différent. Enfin bon, ce ne sont là que des points de détail qui ne gâtent en rien la lecture, même s’ils m’ont fait grincer des dents sur le moment !
C’est donc une excellente lecture, romanesque à souhait, que je vous conseille sans hésitation ! Quant à moi, après un tel coup de coeur, je ne vais pas attendre avant de découvrir le précédent roman de Luca di Fulvio, Le gang des rêves.

Extraits :
« La vérité n'a pas la moindre importance. Ce qui compte, c'est ce qu'on affirme, en dépit même de l'évidence. Des jeunes gens de bonne famille, à Rome, sont ordonnés évêques ou cardinaux à quinze ans parce qu'un jour ils deviendront papes. On ne demande pas à ces jeunes gens ou à ces papes de ne pas avoir des bataillons de maîtresses ou de ne pas se livrer à la perversion, mais simplement d'affirmer le contraire. Et tout l'apparat est là pour le confirmer. Rappelle-toi : dans notre monde, la vérité est celle qu'écrivent les puissants. En soi, elle n'existe pas. »

« La vie est simple. Quand elle devient compliquée, ça veut dire qu’on se trompe quelque part. Ne l’oublie jamais. Si la vie devient compliquée, c’est parce que c’est nous qui la compliquons. Le bonheur et la souffrance, le désespoir et l’amour sont simples. Il n’y a rien de difficile. »

« - J'ai vu naître un navire, répondit Mercurio… Et j'ai compris que rien ne ressemble autant à... la liberté qu'un navire. »

« Ils avaient l’air de trois chiens perdus, comme ceux qui errent dans les rues de Rome lorsqu’il fait nuit noire, la peau sur les os, prêts à dresser le poil au moindre bruit et à s’enfuir devant une ombre. Comme eux, ils retroussaient les babines, espérant passer pour des bêtes féroces, alors qu’ils n’avaient qu’une peur : prendre des coups. Mercurio savait ce qu’ils ressentaient. Parce qu’il le ressentait aussi. »

« Il n'y a pas de rêves trop grands... »

 Les avis de Nicole, Papillon,



6 commentaires:

  1. Ah oui les incohérences, c'est étrange, car l'auteur a sans doute bien cherché (mais le prêt à porter, ça me parait beaucoup plus récent)

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    1. Pour moi, ça a suivi la Révolution Industrielle, avant ça les vêtements étaient faits maison ou achetés chez des fripiers pour la plupart, et seuls les plus riches faisaient appel à un tailleur, et les couturières, dentellières et autres faisaient le boulot.

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  2. Je ne me sens pas très attirée par cet auteur, mais tu vas finir par me convaincre !

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  3. J'ai trouvé au Gang des rêves un peu trop de grosses ficelles romanesques, et là, j'ai l'impression que ça m'agacerait encore. Les incohérences que tu relèves sont assez incroyables : mais que fait l'éditeur ?

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    1. Je n'ai pas lu Le gang des rêves, toutefois dans celui-c les ficelles romanesques sont aussi évidentes. Le roman ne brille pas par son originalité mais pourtant il a quelque chose qui en fait une lecture magnifique.

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